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Notre projet avec le partenaire GRADEM au Mali Accès à une éducation et surtout sans violence pour les enfants en zones rurales. Promotion d'Initiatives citoyennes, pouvait clôturer en 2021 avec des très bons résultats, selon l'évaluation finale du projet.
Voici le rapport d'évaluation avec un résumé exécutif :
Notre nouveau projet au Mali contribue desormais au transfert des compétences de ces approches éprouvées à d'autres organisations de la société civile afin de multiplier leur envergure.
Elisabeth Munsch, de retour d’une mission de suivi du projet « Promotion d’initiatives citoyennes de développement durable pour l’accès des enfants à leurs droits en milieu rural défavorisé » exécuté dans les régions de Koulikoro, Ségou et Mopti, raconte :
La situation sécuritaire au Mali est toujours problématique ; pendant mon séjour, une attaque djihadiste d’un cantonnement de gendarmerie, dans la région de Ségou, à 80 km de la frontière Mauritanienne a fait une vingtaine de morts parmi les gendarmes et les terroristes se sont emparés des armes, puis ont brulé toutes les installations. Au pays Dogon, les échauffourées régulières font des morts tous les mois ; les chiffres ne sont pas communiqués pour ne pas effrayer davantage les populations qui sont devenues méfiantes, « parce qu’on ne sait pas qui est qui ».
L’équipe de notre partenaire GRADEM a cependant pu exécuter normalement les activités de la 1ère année du projet.
Le manuel d’inculturation des droits de l’enfant en 3 langues (Bambara, Bomou et Donosso) est presque achevé ; il reste à y inclure les illustrations pour lancer son impression. Le processus d’élaboration a suscité l’enthousiasme des participants qui saluent tous cette initiative et qui ont déclaré spontanément qu’ils allaient s’impliquer dans sa vulgarisation.
En effet, des leaders jeunes, des leaders femmes, des communicateurs traditionnels, dans les différentes communes se sont réunis pour discuter les formulations du français facile en langue locale. Cette approche a suscité une prise de conscience. Les proverbes, qui montrent que la protection des enfants est enracinée dans la tradition, ont été enrichis (pas de transcription littérale, mais recherche du proverbe qui va dans le même sens). Des formulations ont été reprises pour trouver la bonne expression traduisant correctement les droits : « l’esprit et non du mot à mot », les rendant compréhensibles pour tous. Il a été constaté que les traducteurs officiels sont souvent loin de la façon de s’exprimer des gens dans les communes.
Le document a ensuite été testé auprès de membres des coopératives, des écoles (enseignants et jeunes), des services techniques de l’Etat locuteurs des 3 langues pour s’assurer qu’il est bien compréhensible. La lecture a été faite dans les langues puis les participants ont confronté leur compréhension. De nombreux ajustements ont encore été faits. La Directrice de la Promotion Féminine confirme qu’il s’agit d’une première et que ce travail est extrêmement important ; il suscite une forte adhésion.
Les enfants ont encore été impliqués pour la production d’illustrations du document. Une équipe mixte adultes-enfants a sélectionné 20 dessins les plus parlant. Ces dessins ont été ensuite confiés à un info graphiste afin de les reproduire pour être intégré dans le manuel.
Après un an d’activité, les nouveaux villages intégrés dans la dynamique de création de coopératives en vue de favoriser la scolarisation des enfants ont tous créés la leur.
Sur 76 coopératives existantes, 46 (61%) sont performantes et 30 (39%) ne le sont pas encore. Le constat a été fait qu’il existe un lien direct entre performance et la régularité de la tenue des rencontres mensuelles des membres ainsi que la qualité de la tenue des outils de suivi et de gestion. Le niveau d’alphabétisation des secrétaires et trésoriers des coopératives doit encore être amélioré.
4926/5298 coopérateurs ont eu accès à des fonds AGR (près de 93%). Ceux qui n’ont pas encore reçu sont dans les villages où certaines coopératives sont encore en période de structuration (une partie des villages faisait partie du projet précédent et a déjà pu profiter de la mise en place des coopératives avant le début de ce projet en cours). 79 % de ceux qui ont eu des fonds ont augmenté leurs revenus et payent plus aisément les frais et fournitures scolaires de leurs enfants. Les coopératives performantes ont pu offrir une ristourne de 5000 FCFA (soit 7-8 €) à leurs membres lors de la rentrée scolaire en vue de faciliter l’achat des fournitures scolaires. Cette décision à bien aidé les parents. La situation scolaire de 6789 enfants des membres des coopératives dont 3437 filles (51%) est améliorée. Il reste très peu d’enfants non scolarisés dans les villages concernés par le projet.
Grace aux coopératives les parents ont pris conscience de l’importance de la scolarisation des filles ; les animatrices filles du projet sont des exemples pour eux, ils voudraient que leurs filles accèdent aussi à un tel statut.
Une éducation sans violence : abandon des châtiments corporels dans les écoles et dans les familles. 195 autorités scolaires et enseignants ont été formés aux méthodes éducatives non violentes. Ces formations ont été restituées dans toutes les écoles. Les conseillers pédagogiques sont bien impliqués dans cette dynamique qui est inscrite dans la politique nationale de l’enseignement. Le changement est semé (49% des enseignants font un effort dans ce sens), mais il faut suivre de très prêt et aider à réfléchir à partir de cas concrets, aux alternatives. Un guide pratique serait utile. L’équipe GRADEM va commencer dès à présent à collecter les bonnes pratiques.
Ce sujet a aussi été abordé avec les membres des coopératives et suscite de vives discussions et controverses. Certains adultes affirment qu’ils ne seraient pas ce qu’ils sont aujourd’hui sans châtiments corporels ; ces châtiments les ont maintenus dans le droit chemin, les ont obligés à travailler sérieusement etc. Il y a encore du chemin à faire pour obtenir un réel changement des comportements.
La ferme école GRADEM de Zantiguila : du rêve à la réalité
Le terrain aride acquis par GRADEM à Zantiguila se transforme peu à peu. L’espace a été clos et des infrastructures construites : une maisonnette pour le gardien, un bâtiment pour le personnel et la formation ainsi qu’un poulailler. 210 arbres fruitiers divers sont plantés et 3500 m² de maraîchage sont en cours d’exploitation. Deux forages permettent d’effectuer l’arrosage principalement en goute à goute. Le secteur élevage comprend l’embouche de 3 bœufs destinés à la vente lors de la prochaine fête de Tabaski et le secteur aviculture avec plus de 300 poulets, pintades, canards.
Cette deuxième année devrait pouvoir permettre de dégager des premiers bénéfices et débuter la formation de membres des coopératives et de groupement de jeunes.
Ce jeudi 29 novembre, toute l’équipe de l’antenne de Ségou s’est retrouvée à la ferme école du Dr Moussa Diabaté pour une journée d’initiation aux principes de l’agroécologie. Le Dr Diabaté a réalisé cette initiation à travers la visite expliquée de sa ferme. D’abord la partie élevage : différents gallinacés, des petits ruminants et quelques vaches. L’élevage et le maraichage fonctionnent de pair. Fumier et fientes sont utilisés après compostage pour fertiliser le périmètre de maraichage. Dr Diabaté a expliqué le fonctionnement interdépendant des différentes espèces végétales, la vie de la terre avec les différents micro-organismes, leur rôle ainsi que celui des insectes. Il a également expliqué l’usage thérapeutique de différentes plantes en phytothérapie. L’équipe s’est montrée très intéressée et les agronomes chargés de développer la ferme du GRADEM ont récupéré des boutures et graines.
Il a été convenu qu’elle établira son plan de production avec le Dr Diabaté. La visite s’est terminée par un moment d’échange ou chacun a eu l’occasion de poser des questions d’éclaircissement.
La visite de cette ferme montre qu’en utilisant un mode de production respectueux de l’environnement et de la biodiversité, on peut produire des légumes et des fruits à profusion, bons pour la santé, bien gagner sa vie, tout en transformant un bout de terrain aride en jardin d’Eden.
Au cours d’une période triennale qui s’est achevée en février 2018, grâce à la création de coopératives dans des villages défavorisés des régions de Ségou et de Koulikoro permettant à leurs membres d’accroitre substantiellement leurs ressources, tous les enfants des membres des coopératives ont pu scolariser leurs enfants, acheter leurs fournitures scolaires et mieux les nourrir (cf. article en bas de cette page).
Forts de leur succès KiRA et GRADEM ont décidé de mener à bien un nouveau projet dans ces régions en incluant de nouveaux villages. Il restait encore beaucoup à faire pour que les enfants jouissent pleinement de leurs droits.
En effet, les droits de l’enfant ne sont pas encore inculturés dans les communautés villageoises. On assiste à un rejet des droits de l’enfant en raison d’une mauvaise compréhension liée à de mauvaises traductions et l’absence d’un manuel de référence en langues locales (Bamanan, Bomou et Donosso).
Dans les écoles, la majorité des enseignants pratiquent toujours le châtiment corporel. Les initiatives économiques (petit commerce, maraichage, aviculture et embouches bovines) des femmes et des jeunes filles membres des coopératives fonctionnent bien, mais il est nécessaire de consolider les acquis pour leur pérennisation. Avec une assise économique plus forte, les coopératives pourront être à l’initiative d’actions collectives permettant de répondre aux besoins de la communauté en matière d’infrastructures scolaires ou autres.
Dans les nouvelles communes d’intervention, tout reste à faire en matière de scolarisation des enfants et de lutte contre l’exode précoce.
Par ailleurs, dans de nombreuses coopératives, les adhérents ont mené à bien des cultures maraichères, pratiquant des monocultures successives. Ils ont constaté que les maladies se développaient et qu’il fallait toujours plus d’engrais pour parvenir aux mêmes rendements. Pour pallier à ces problèmes et inscrire le maraichage dans la durée, les paysans seront initiés à l’agroécologie et à la permaculture.
Une ferme de GRADEM est en train de voir le jour. Les cultures seront développées sur ce mode, ce qui permettra d’accueillir les adhérents des coopératives en stage pour se former à ces nouvelles techniques. Les formateurs effectueront un suivi sur les périmètres de culture des paysans formés pour leur prodiguer des conseils afin de ne pas manquer le rendez-vous avec le succès escompté.
Cette ferme devra en outre contribuer à l’alimentation des filles accueillies au Centre "Bamunam" de GRADEM et à terme générer des revenus pour cette association.
Le projet « Amélioration du statut, de l’éducation et de la formation ainsi que des perspectives d’avenir des filles dans 58 villages de 5 communes rurales dans les régions de Ségou et Koulikoro 1.03.2015 – 29.02.2018 » prend fin. Elisabeth Munsch, chargée de projet accompagne l’équipe GRADEM pour la fin de l’évaluation externe et les travaux de capitalisation en vue de la clôture.
Elle nous rapporte les principaux résultats :
Changements acquis
Les évaluateurs ont dit :
« Un très bon travail a été fait sur le terrain, il s’est agi d’une approche originale par la base, les personnes y croient, elles voient que ce n’est pas comme pour d’autres projets où les représentants de la structure viennent déverser sur elles leur vision et imposent des manières de faire mais on note une fragilité des résultats compte tenu du faible niveau d’instruction/analphabétisme des personnes cibles/bénéficiaires. On constate une prise de conscience des populations et des changements de comportement et c’est grâce à l’augmentation des ressources des familles que les enfants vont à l’école et que l’exode recule. Le bon fonctionnement des coopératives est central car il donne des possibilités aux villageois/familles démunies mais les outils de gestion des coopératives ne sont pas parfaitement maitrisés par les intéressés, ils ont besoin d’être soutenus afin d’éviter les dérapages ou la récupération par une personne à son profit personnel. Il faut encore renforcer le sentiment d’attache et d’appropriation des actions du projet. »
Sensibilisés et formés sur le système coopératif par les animateurs du GRADEM, 44/52 villages accompagnés dans le cadre du projet « Amélioration du statut, de l’éducation et de la formation ainsi que des perspectives d’avenir des filles dans 58 villages de 5 communes rurales dans les régions de Ségou et Koulikoro » ont créé leur coopérative dans le but de faciliter la scolarisation de leurs enfants et de prévenir l’exode précoce des filles.
Selon les villages, elles comptent déjà 60 à plus de 100 membres qui chacun se sont acquittés de leurs droits d’adhésion et payent une cotisation mensuelle. Les coopérateurs ont élu leur présidente et désigné les membres du bureau. Ils ont également défini leurs règles de fonctionnement et les appliquent avec beaucoup de rigueur.
GRADEM a versé un fonds de démarrage remboursable qui a permis d’octroyer des prêts aux coopérateurs. Ceux-ci ont démarré diverses activités : petits commerces tels la vente de fripes, de céréales, de beignets, de bois, … ; aviculture ou petit élevage ou encore le maraichage. La coopérative achète les intrants en gros et les revend à bon prix aux adhérents.
Les coopérateurs discutent ensemble pour fixer le prix de vente de leurs produits afin que personne ne casse les prix et ne perde dans l’affaire.
Toutes les décisions sont prises ensemble lors des réunions mensuelles et les absents payent une amende ; mais ça c’était au début car maintenant la réunion mensuelle est devenue un moment de joie, de concertation et de dialogue ou chacun constate que la vie au village est devenue meilleure :
D’autres importants bénéfices non attendus sont perceptibles :
Les villageois rêvent déjà : d’ici quelques temps ils pourront réhabiliter l’école ou créer un second cycle pour leurs enfants ou encore construire une maternité.